La création d’entreprise, un parcours semé d'embûches, est soumise à de nombreux facteurs qui influencent sa pérennité. L’étude menée par le Laboratoire de recherche en gestion des entreprises et des organisations (LaReGEO) et commandée par la Maison de l'Entreprise du Burkina Faso (MEBF) sur la mortalité des entreprises a permis d'identifier plusieurs de ces facteurs, tant internes qu'externes. Ces résultats offrent des pistes pour comprendre les raisons qui conduisent de nombreuses entreprises à échouer prématurément. Nous aborderons dans cet article l'impact de l’âge du promoteur, la motivation et la personnalité de ce dernier, le niveau de formation, le secteur d’activité, la planification stratégique, et l’environnement économique et social dans lequel les entreprises évoluent.

1. L'Impact de l'âge sur la mortalité des entreprises

L’âge du promoteur est un facteur clé dans la survie des entreprises. Selon l’étude, le risque d’échec est plus élevé pour les entrepreneurs dans les tranches d’âge de 45 à 55 ans et de 55 à 64 ans. Cette catégorie d’âge présente des défis particuliers, où le risque d’échec s’accélère, atteignant un taux de 50% après seulement quatre ans d’activité. Cela pourrait être dû à divers facteurs, tels que la gestion de la transition vers la retraite, une plus grande résistance au changement ou un manque de flexibilité face aux nouveaux défis économiques. Les jeunes entrepreneurs, en revanche, semblent plus enclins à prendre des risques et à s’adapter, ce qui pourrait expliquer leur meilleure résilience face à la mortalité des entreprises.

2. La motivation et la personnalité du promoteur

La motivation personnelle et la personnalité du promoteur jouent également un rôle crucial dans la réussite ou l’échec de l’entreprise. Les entreprises dirigées par des promoteurs hésitants ou peu déterminés ont moins de chances de survivre. En revanche, celles pilotées par des entrepreneurs engagés, optimistes et passionnés semblent mieux résister aux aléas du marché. Une forte motivation permet au promoteur de surmonter les difficultés, de garder le cap dans les moments difficiles et de maintenir une vision claire du futur de l’entreprise.

3. Le capital humain et le niveau d'instruction

Un autre aspect surprenant de l’étude concerne le lien entre le niveau d'instruction du promoteur et la mortalité des entreprises. Il est constaté que les entreprises créées par des promoteurs les plus instruits (niveau licence et plus) ont un risque d’échec plus élevé et un échec plus rapide. Ce phénomène pourrait être expliqué par le fait que des promoteurs trop formés peuvent avoir tendance à ignorer les réalités du terrain ou à surestimer leurs compétences dans des domaines où l’expérience pratique prime. En revanche, les promoteurs moins instruits semblent résister mieux à la mortalité, possiblement en raison d'une approche plus pragmatique et d'une plus grande capacité d'adaptation. De plus, les entrepreneurs sans expérience dans leur secteur d’activité rencontrent également un risque élevé d’échec, suggérant l'importance de la pratique dans le processus entrepreneurial.

4. Le secteur d’activité

Le secteur dans lequel une entreprise évolue est un facteur décisif dans sa longévité. D’après l’étude, le risque d’échec est significativement plus faible pour les entreprises opérant dans le secteur de l’artisanat. En revanche, les entreprises évoluant dans les secteurs du service et du commerce sont confrontées à des risques bien plus élevés. Cela peut être dû à une concurrence accrue, à une saturation du marché ou à une difficulté d’accès à une clientèle fidèle. Le secteur artisanal, par son caractère souvent local et plus personnalisé, présente moins de vulnérabilité face à ces défis.

5. La planification stratégique

Un autre constat important de l’étude concerne l'importance de la planification stratégique. Les entreprises qui ne prennent pas le temps de décliner leur stratégie en actions concrètes avant le démarrage sont beaucoup plus susceptibles de connaître un échec précoce. En effet, les entreprises qui planifient soigneusement leur développement, qui anticipent les obstacles et qui définissent des objectifs clairs et mesurables ont beaucoup plus de chances de réussir. Une planification solide permet de mieux gérer les ressources, de se préparer à la concurrence et de s’adapter aux défis du marché.

6. Le Contexte environnemental

Enfin, le contexte économique et social joue un rôle majeur dans la réussite ou la disparition des entreprises. Au Burkina Faso, plusieurs facteurs environnementaux sont identifiés comme des causes de la vulnérabilité des entreprises. Les difficultés d’accès au marché et aux financements, la concurrence des produits étrangers, ainsi que les problèmes liés à la fiscalité, sont des obstacles significatifs pour les entrepreneurs locaux. L’accès au marché reste limité, particulièrement pour les petites entreprises qui peinent à trouver leur clientèle, surtout dans les régions rurales. Les problèmes d’accès aux financements et les taux d’intérêt élevés rendent l'expansion difficile, tandis que la fiscalité, jugée trop contraignante, constitue un fardeau pour les entrepreneurs.

Une mortalité des entreprises complexe mais compréhensible

La mortalité des entreprises au Burkina Faso est un phénomène complexe qui résulte d’une combinaison de facteurs internes et externes. Si des éléments comme l’âge, la motivation et le capital humain influencent la survie des entreprises, l’environnement dans lequel elles évoluent joue également un rôle crucial. Les entrepreneurs doivent prendre conscience de ces facteurs et les intégrer dans leurs stratégies pour maximiser leurs chances de succès. Par ailleurs, des efforts visant à améliorer l'accès au marché, aux financements, à une fiscalité plus favorable et à un meilleur accompagnement entrepreneurial pourraient grandement réduire la mortalité des entreprises et permettre à celles-ci de prospérer.